dimanche 29 avril 2007

1er mai 2006 Lomé - entre la bière de T'chouk et le reboisement

Article publié dans le "Drapeau-Rouge" numéro 13 juin 2006
article complet : http://togo2006-pc.blogspot.com/2007/03/1er-mai-2006-lom-entre-la-bire-de.html

C'est le Premier Mai à Lomé, je compte bien me rendre aux manifestations et aux festivités de la fête du Travail. Déjà depuis hier soir la radio togolaise n'a pas arrêté de nous rappeler l'importance du premier mai pour tous les travailleurs. C'est ainsi que j'apprends que l'ensemble des syndicats du Togo va défiler ensemble (en front commun) pour aller remettre leur « cahier de doléances » aux représentants du gouvernement
Arrivé à proximité du rassemblement on constat une forte et ostensible présence policière et militaire. Il est clair que les représentants officiels sont déjà arrivés, garde d'honneur, limousine, voiture blindée finissent de compléter le tableau. Dans la foule des travailleurs amassée quelques panneaux revendicatifs et une plainte « on n'entend pas les discours, ils auraient pu mettre un micro et des haut-parleurs tout de même. »

Si l'ambiance générale paraît décontractée, le regard inquisiteur d'un gendarme et de ses collègues a vite fait de vous calmé. De toute façon il fait déjà trop chaud en cette fin de matinée pour crier quelques slogans. Visiblement, cette espèce de cérémonie solennelle à la mise en scène si cérémonieuse ne nous apprendra rien de plus. D'ailleurs, les travailleurs, avec leurs t-shirts blancs frappés des emblèmes et des sigles de leurs formations syndicales, s'en vont déjà par petit groupe.
Ces groupes qui semblaient suivre, un temps, le même chemin bientôt se séparent et se dispersent dans toute la ville.



Aux abords de la Place de l'Indépendance, quatre personnes prennent l'ombre sous les arbres. Ce sont des chauffeurs, (taxis, taxis collectifs, routiers), pardon, se sont des membres d'USYNDICTO le premier et le plus ancien des syndicats du Togo. Celui-ci regroupe tous les chauffeurs, routiers, taxis, etc. en effet les syndicats au Togo se répartissent sur une base corporatiste, toute foi chaque syndicat revendique parallèlement une appartenance idéologique (politique).



Après un premier bol de t'chouk, sorte de bière de mil à fermentation spontanée, on commence à discuter à propos du syndicat, du Premier Mai, de la CNTT (confédération nationale des travailleurs togolais) et d'autres camarades nous rejoigne.
Seule la CNTT est habilitée à discuté avec le ministre (du travail), celle-ci regroupe les représentants de toutes les organisations syndicales, c'est encore sous l'égide de celle-ci que l'on établit le « cahier des doléances » au sein de la conférence sociale qui regroupe les syndicats plus les représentants du gouvernement et le patronat.

Christophe Agbeitor, alias "papa cellulaire", explique que le délégué général, Agbemadon a été élu pour des raisons politiques, mais celui-ci ne connaît rien au syndicat et aux problèmes des chauffeurs. C'est son adjoint Moussa qui aurait dû être élu en fait, c'est ce dernier d'ailleurs qui fait réellement fonctionner le syndicat.
Sous les arbres, avec le t'chouk et le plat de chèvre et de manioc la parole se libère et on a vite fait d'oublier le temps qui passe.



Un peu plus loin pourtant, les échos d’une sono se font entendre. C'est un autre syndicat, celui des travailleurs du bois et produits dérivés. Ici l'ambiance quoique toujours bon enfant est un peu plus solennel (-- pourrait presque nous faire penser que nous sommes place Rouppe --). Messieurs Ayao et Richard expliquent les problèmes relatifs à la Loi sur la déforestation.



La Loi actuelle impose une taxe globale pour l'exploitation forestière. Cette taxe qui est théoriquement destinée à financer le reboisement est en pratique détournée à d'autres fins. Le syndicat explique : d'une part, les exploitants actuels ne sont que des sous-traitants de sous-traitants de multinationales ; d'autre part, on fait porter la faute du déboisement, officiellement, sur les femmes qui font du charbon de bois (micro source de revenus complémentaire et indispensable pour les foyers...) Mais en réalité, selon le syndicat, les femmes utilisent le plus souvent des déchets de coupe.



Ce sont les exploitants forestiers qui par leur pratique de coupe systématique, alors qu'ils utilisent en pratique, pas plus d'une ou deux essences, qui sont en réalité responsables de la déforestation. Lors de l'abatage, les arbres chutent sans être guidés entraînant avec eux les arbres voisins, fendant les troncs et brisant les branches maîtresses. Par ailleurs, le syndicat dénonce que les parcelles misent en exploitations sont souvent achetée par des prête-noms pour des sociétés internationales. C'est ainsi que se construit la revendication du syndicat qui demande une responsabilisation de l'exploitant forestier dans le processus de reboisement, en lieu et place de la taxe globale (pour le reboisement). Les femmes du syndicat qui font du charbon de bois confient, par ailleurs, qu’elles ont déjà entrepris des campagnes de reboisement en leur nom propre. ...


Photo: pierre Capoue - Togo 2006

Juin 2006 - Pierre Capoue

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